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Bernard DESCHAMPS réfute les arguments d’un "sant’egidiote" attardé cherchant à disculper de leurs crimes les dirigeants du Front islamique du Salut *

mercredi 29 août 2012

Dans les années 90, alors que l’Algérie faisait face, dans des conditions très difficiles, à la terreur islamiste, le journal LIBERATION, par la formule « Qui tue qui ?  » jetait le doute sur les auteurs des tueries, accréditant l’idée que le pouvoir algérien en serait le véritable responsable.

Aujourd’hui, 24 août 2012, un universitaire Ahmed Henni reprend à son compte cette thèse dans les colonnes de L’HUMANITE. Mais à la différence de LIBÉRATION, il n’interroge pas, il affirme que « l’appareil militaire algérien » engagea « une sale guerre » contre des « rebelles islamistes » qu’il qualifie de « militants ». Selon lui, c’està la « violente riposte de l’appareil militaire  » la « protestation armée, [ la ] lutte de guérilla, [aux] actions terroristes  » qui est la cause des « 150 000 morts, 700 000 blessés ou estropiés, près de 10 000 disparus, des dizaines de milliers d’arrestations. » Il n’écrit pas que ces morts, ces blessés, ces disparus sont le fait de « l’appareil militaire algérien », mais il le laisse entendre. Ainsi, d’une phrase, est évacuée la responsabilité du FIS (Front Islamique du Salut) et du GIA (Groupe islamique armé) dont, pratiquement plus personne aujourd’hui, ne nie qu’ils furent les auteurs des crimes de masse commis pendant la décennie 90.

L’auteur se réclame de la Plate-forme de Sant Egidio, élaborée en janvier 1995, à l’initiative de la communauté catholique éponyme dont le siège est à Rome. Ce texte fut signé par les partis et formations suivants : La Ligue Algérienne des Droits de l’Homme ; le FLN, le FFS (socialiste) ; le MDA (Ben Bella), le PT (trostkyste), Ennahda (Frères musulmans), JMC (musulman) et …le FIS (Front Islamique du Salut).

Les Communistes algériens, les syndicats et des partis laïcs y étaient farouchement opposés. J’ai le texte intégral sous les yeux. Il ne porte aucune condamnation des crimes commis par le FIS qui en est signataire, mais il en impute la responsabilité au « climat de terreur » dont le pouvoir algérien serait coupable. Il dénonce l’arrêt du « processus électoral  » après le succès remporté par le FIS et condamne « l’état d’urgence » décrété, rappelons-le, en 1992 par le Président du Haut Comité d’Etat, Mohamed Boudiaf, pour faire face à une situation insurrectionnelle, et qui sera assassiné quelques mois plus tard.

Ce texte exige « la libération effective des responsables du FIS…  » et l’assurance « aux dirigeants du FIS [de] tous les moyens et garanties nécessaires leur permettant de se réunir librement entre eux et avec tous ceux dont ils jugent la participation nécessaire à la prise de décision. » (Paragraphe B.1). Il exige également : L’annulation de la dissolution du FIS. »(Paragraphe B.2) Et ceci alors même que des mercenaires entraînés en Afghanistan défilaient, drapeau de l’Arabie Saoudite en tête, dans les rues d’Alger ! Enfin, il appelle (Paragraphe F.) « la communauté internationale à une solidarité agissante avec le peuple algérien. »

La Plate-forme de Sant Egidio, bien que signée par le responsable du FLN, fut rejetée par le pouvoir algérien auquel l’auteur reproche d’avoir préféré « poursuivre la sale guerre (sic. ! ndlr) jusqu’à amener par la force, les « terroristes » (les guillemets sont de Ahmed Henni ndlr) résipiscence. » On reste confondu devant une telle appréciation ! Ahmed Henni aurait-il préféré que les tueurs poursuivent leurs crimes en toute impunité ?

On pourrait croire après cela qu’il est favorable à la politique de Réconciliation Nationale approuvée par référendum le 29 septembre 2005. Il n’en est rien. Celle-ci ne trouve pas grâce à ses yeux. On comprend pourquoi en étudiant le texte de la Charte de Réconciliation nationale. Celle-ci se prononce ( Chapitre II-Deuxièmement) en faveur de l’ : « Extinction des poursuites à l’encontre de tous les individus qui mettent fin à leur activité armée et remettent les armes en leur possession. Cette extinction des poursuites ne s’appliquera pas aux individus impliqués dans des massacres collectifs, les viols et les attentats à l’explosif dans les lieux publics. ? » et l’interdiction du FIS est maintenue.? On est effectivement loin de la Plate-forme de Sant Egidio qui se prononçait en faveur de la légalisation du parti des assassins

L’article de Ahmed Henni fait un parallèle avec la situation en Syrie où, selon lui, règne également « un appareil militaire ». Il s’étonne du tapage médiatique qui accompagne la guerre qui s’y déroule alors que la « communauté internationale » s’était tue pendant la décennie de sang en Algérie. Il oublie de rappeler que plusieurs pays occidentaux dont la France de François Mitterrand servirent de bases arrière et de refuges à plusieurs dirigeants du FIS. Derrière l’ambiguïté de certaines phrases, on croit comprendre que l’auteur qui regrette l’absence d’intervention occidentale en Algérie dans les années 90, serait favorable à une intervention en Syrie. D’autant qu’il considère que l’opposition syrienne a été contrainte de prendre les armes, ce que pourtant nie l’opposition démocratique.

Pourquoi ce parallèle entre l’Algérie et la Syrie et pourquoi maintenant ? Il y a quelques jours un responsable israélien déclarait que l’Algérie est le pays le plus dangereux pour Israël en Méditerranée. On est donc en droit de se poser la question : après la Libye, la Syrie , l’Iran, l’Algérie ?

Volontairement ou non, l’article de Ahmed Henni à apporte sa pierre à la dangereuse campagne de dénigrement de l’Algérie qui se développe actuellement.

Bernard DESCHAMPS

PS/ Sur des questions aussi sensibles, j’aurais compris que mon quotidien L’HUMANITE (dont je suis un lecteur depuis 61 ans) publie l’article de Ahmed Henni en même temps qu’un argumentaire différent, afin que les lecteurs se fassent leur propre opinion. Malheureusement cela n’a pas été le cas. Je le regrette car le journal, en dépit de l’avertissement selon lequel cet article n’engage que son auteur, donne ainsi le sentiment de prendre cette opinion à son compte

* Le titre est de la rédaction d’Alger républicain.


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Note de la rédaction d’Alger républicain :

Ahmed Henni fait partie de ce groupe de "réformateurs" hamrouchiens placés au plus haut des responsabilités de l’Etat par le régime prédateur de Chadli et célèbres pour cette formule qui voulait tout dire "Ça passe ou ça casse". Chacun sait que Chadli s’était allié aux islamistes dès le début des années 1980 pour contrer les communistes et les progressistes. Sa politique de casse économique et sociale antipopulaire a créé le terreau propice sur lequel ont proliféré les bandes réactionnaires qui utilisaient l’Islam pour exaucer les voeux de larges franges de la bourgeoisie décidées à en finir avec le "socialisme" tout en trompant les jeunes sous le mot d’ordre brumeux d’ "Etat islamique". En fait ils agissaient comme des facteurs d’accélération par la violence du grand tournant opéré dans les années 1990 vers le capitalisme.

Les réformes lancées par Hamrouche n’étaient que le couronnement d’un processus de destruction économique amorcé dès 1980 et le point de départ d’une nouvelle phase dans la "descente aux enfers". Henni et d’autres ex-gauchistes universitaires, ralliés armes et bagages à l’ultra-libéralisme, ont pris toute leur place dans ce processus régressif. Le prolongement de ce tournant à marches forcées était le projet de cohabitation avec les représentants de l’islamisme qu’ils considéraient comme la seule force capable de canaliser la masse des jeunes vers ces nouveaux choix et qui devait, croyaient-ils, se contenter de jouer gentiment le rôle de simple force d’appoint.

Ajoutons à toutes fins utiles que Henni avait vite jugé plus fructueux de troquer ses fonctions universitaires contre celles de haut commis de l’État, avec toutes les gratifications et les facilités qui s’y rattachent.

Difficile de penser que ce choix était dicté uniquement par le désir de veiller à appliquer soi-même et de la façon "la plus correcte possible" les nouvelles lubies réactionnaires pudiquement qualifiées de "réformes" soi-disant nécessaires pour "éradiquer la grosse spéculation" ainsi que le prétendaient nombre de ces "universitaires-réformateurs".

A défaut de pouvoir réaliser ce vœu pieux et chimérique, dans le cadre nouveau du capitalisme impulsé précisément par ces pratiques spéculatives, Henni et consorts s’étaient en fait engagés, qu’ils en aient eu conscience ou non, sur le chemin qui avait failli déboucher sur la seule "éradication" réellement programmée, celle des deux tiers de la population pour sauver et remettre dans le "droit chemin de l’Islam" le tiers restant, comme le prêchait ouvertement Ali Belhadj, un des dirigeants du FIS les plus enragés.

Hachani, dirigeant du FIS désigné pour prendre la tête de cette organisation obscurantiste après l’arrestation en juin 1991 de Abassi Madani et de Ali Belhadj, en donnait un sinistre avant-goût dans ses discours électoraux. Il jubilait quand il scandait devant des milliers de personnes en transes l’anagramme du sigle du FIS : "SIF ! SIF ! SIF ! ", c’est-à -dire "sabre" !

Tout un programme que seul Henni et ses acolytes semblent avoir effacé de leur mémoire.

Alger républicain


Voir en ligne : Article repris de : http://www.bernard-deschamps.net