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L’élection présidentielle du 9 avril 2009. Une mascarade électorale sans précédent

Aujourd’hui l’AFRIQUE / n°113/ Septembre 2009 en partenarait avec Alger Républicain

mardi 1er septembre 2009, par Alger républicain

C’est sans surprise qu’à l’issue de ce scrutin Abdelaziz Bouteflika a été reconduit pour cinq ans de plus dans ses fonctions de chef de l’État.

La seule vraie surprise est celle qui a été provoquée par les chiffres officiels de la participation électorale et le score faramineux “décroché” par Bouteflika.

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Kader Badreddine

Le trucage électoral étant devenu une pratique naturelle, tout le monde s’attendait à sa “réélection” automatique pour un troisième mandat de 5 ans, mais pas avec un tel taux ni au mépris le plus flagrant des réalités. Selon le ministre de l’Intérieur, le taux de participation aurait été de 74% en Algérie et celui du nombre de voix qui se seraient portées sur le nom du chef de l’Etat auraient dépassé les 90% ! Le taux de participation avait été de 58% lors de l’élection présidentielle de 2004. Ce taux était déjà gonflé, bien que l’élection ait été plus vive en raison de contradictions apparues au sein du régime et reflétées dans la candidature de Benflis face à celle de Bouteflika. D’ailleurs, dans l’émigration en France où le trucage est une opération très délicate à mener, le taux de participation officiellement enregistré n’est que de 36,5%. En Kabylie où cette fois-ci une certaine démobilisation des citoyens a permis aux hommes de l’administration de jouer avec les chiffres, le taux de participation officiel n’a été que de 30%.

Les chiffres officiels sont en contradiction avec les observations relevées durant la journée du 9 avril : centres de vote désertés pour la plupart, témoignages d’agents qui ont tenu les urnes sur le faible taux de participation, principalement dans les villes, protestation des candidats battus qui ont présenté des faits irréfutables sur les manipulations, les fraudes, le bourrage des urnes, les instructions données de gonfler les taux dès le matin par des walis affolés.

La liste des graves irrégularités relatées dans la presse est interminable : urnes substituées, éviction à l’aide parfois de la force des représentants de partis non dociles, militaires et policiers votant dans plusieurs bureaux de vote, etc.

Louisa Hanoune, responsable d’un parti trotskyste qui soutient de façon “critique” Bouteflika, au nom de la défense de la nation contre les périls de l’ingérence extérieure, n’a obtenu qu’un peu plus de 4%. “Ils ont fait pire qu’en 1997” s’est-elle rageusement écriée. Elle a raconté qu’un de ses adjoints dans la direction de son parti a constaté en allant voter à Sétif que “quelqu’un d’autre” l’avait déjà fait à sa place ! Elle s’est mise à déballer les secrets des trafics électoraux auprès de la presse nationale et des correspondants des TV internationales appelés à sa rescousse. Ce qui, selon certains journaux, a amené des gens du pouvoir à lui rappeler discrètement qu’elle ne represente pas grand’chose sur l’échiquier politique, n’étant rien de plus que le fruit d’une fabrication savante du régime qui lui a ouvert généreusement depuis 15 ans plateaux de télé et ondes radio. Moussa Touati du FNA et autre candidat à cette élection a rapporté qu’à l’ouverture à 8 heures du matin des bureaux de Tébessa 309 311 électeurs sur les 392 573 inscrits, soit 70, 80%, “avaient déjà voté” !

Les organisateurs de la mise en scène n’ont rien laissé au hasard pour donner de la crédibilité à leur opération. La télévision a filmé sous tous les angles les longues files d’électeurs qui attendaient patiemment leur tour pour accomplir leur “devoir électoral” de citoyens libres, conscients et responsables. Il s’est avéré très vite qu’il s’agissait de fonctionnaires ramenés dans des bus spéciaux pour voter dans des centres préalablement sélectionnés. Encore une fois c’est une Louisa Hanoune humiliée par le parjure des “émissaires” du pouvoir lui promettant un « bon score » qui a dénoncé la supercherie. Elle a révélé que des dizaines d’élèves d’une école de formation de femmes policiers de la grande banlieue avaient été amenées par bus et sagement alignées dans le même centre qu’elle - en plein coeur de la capitale ! - pour voter et se faire filmer par la télé. Le même scénario, mis en exécution ailleurs avec des éléments du service national, a été rapporté par des journalistes.

En dépit de leurs certitudes et de leur satisfaction de façade, les hommes du régime en place ne peuvent éviter de ressentir de profondes inquiétudes devant une telle désaffection populaire malgré les promesses démagogiques, les sommes colossales gaspillées pour mener une campagne d’affichage à faire rougir de jalousie Obama, les mesures de dernière minute tels que l’augmentation des bourses des étudiants, l’effacement de la dette des agriculteurs, etc.

Le régime s’est fortement discrédité. L’appui prestement manifesté par Sarkozy et Obama ne remplacera pas l’hostilité de la majeure partie de la population indignée par tant de mépris.

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Kader Badreddine