Syrie : des milliards de dollars aux rebelles pour sécuriser un gazoduc

dimanche 2 juin 2013

Le richissime Qatar soutient les rebelles syriens opposés au président Assad. L’enjeu n’est ni politique, ni démocratique, mais plutôt un gazoduc à destination de l’Europe.

Gazoduc de la Turkie vers la Syrie - <span class="caps">DR</span>

Selon le quotidien britannique Financial Times du 17 mai dernier, le Qatar aurait, au cours de ces deux dernières années, apporté un soutien financier de trois milliards de dollars à « la révolte syrienne ». Le Qatar offre à chaque déserteur du régime Assad une prime de 50 000 dollars. Le Financial Times aurait également recueilli des dizaines de témoignages sur le rôle du Qatar auprès de chefs rebelles en Syrie et à l’étranger, mais aussi de fonctionnaires gouvernementaux dans la région et en Occident.

Les observateurs aiment à plaisanter sur le fait que le l’émir du Qatar, Hamad bin Khalifa al-Thani, « s’est payé une révolution en Syrie ». En soutenant les rebelles islamistes dans tout le monde arabe, l’émir espère devenir une sorte de « Nasser panislamique ».

Toutefois, ce que le Financial Times oublie de dire, c’est que l’émir du Qatar vise à promouvoir ses intérêts économiques. Comme c’est souvent le cas au Moyen-Orient, il est question de matières premières et de pipelines.

Concrètement, il s’agit ici d’un projet de gazoduc qui devrait traverser l’Arabie saoudite et la Jordanie jusque dans le Sud de la Turquie. De là, le gaz qatari serait acheminé vers l’Europe occidentale via le gazoduc Nabucco. Le problème, c’est que le régime de Bachar al-Assad y est opposé. Ceci explique également pourquoi le gouvernement turc a soudainement appelé à renverser Assad.

Les projets européens

La majorité du gaz exporté par le Qatar est du gaz naturel liquéfié (LNG, acronyme anglais).

En Amérique du Nord, le marché est saturé, des dizaines de nouveaux réservoirs de LNG devraient bientôt inonder l’Asie de gaz américain, avec pour conséquence une chute des prix du gaz naturel sur le marché asiatique. La seule échappatoire pour le Qatar est la construction d’un gazoduc vers l’Europe, un projet qui existe depuis 2009 déjà et dans lequel la Syrie joue un rôle de premier ordre. Ce projet bénéficie par ailleurs du soutien des politiciens européens, puisqu’il permettrait à l’Europe de réduire sa dépendance par rapport au gaz russe.

Le gouvernement Assad a cependant refusé de participer au projet. En effet, les relations entre le Qatar et la Syrie sont tout sauf paisibles. En juillet 2011, la Syrie a conclu avec l’Iran et l’Irak un accord stratégique qui prévoit la construction d’un gazoduc qui acheminerait le gaz iranien vers la Syrie et, de là, vers l’Europe. Cet accord constitue donc une entrave sérieuse aux projets de l’Europe et du Qatar. Mais, par chance, c’est juste à ce moment-là qu’éclate la « révolution » syrienne que le Qatar n’hésite pas à « racheter »...

Article de Rainer Rupp pour Junge Welt,

traduction des camarades du Parti du travail de Belgique

repris par http://solidarite-internationale-pc...