Décès de notre ami Fernand Gallinari

samedi 21 mars 2020
par  Alger republicain

C’est avec une tristesse indicible que nous venons d’appendre le décès de notre ami. Fernand est décédé à l’hôpital de Sète (France) des suites d’un accident conjugué à des insuffisances cardio-respiratoires qui minaient sa santé depuis des années. Sa disparition plonge tous ceux qui l’ont connu dans une profonde affliction.

Courageux et lucide jusqu’à son dernier souffle Fernand avait résisté à l’abattement moral qui le guettait depuis la disparition de sa compagne Sakina en décembre dernier. Mais son état physique s’était détérioré. Il ne lui a pas permis de surmonter cette épreuve malgré la solidarité active que lui ont manifestée de nombreux amis proches, notamment ceux de Sète.

Fernand nous lèguera le souvenir d’un partisan convaincu du socialisme, de la lutte pour en finir avec l’exploitation et l’oppression inhérentes au régime capitaliste.

Une conviction chevillée au corps quand il a adhéré au PAGS (Parti de l’Avant-Garde Socialiste), héritier du PCA, dès sa formation dans la clandestinité dans les années 1960.

C’était un polytechnicien accompli. Il avait décroché son diplôme en France à la veille de l’indépendance comme couronnement de son séjour forcé dans ce pays. Il avait suivi son père expulsé d’Algérie après son arrestation en 1956 par les agents de la répression coloniale. Son père avait pris sa part dans le combat libérateur en tant que membre du PCA. Il était une figure prestigieuse au sein des militants communistes de Bab el Oued des années cinquante. Sa mère était elle aussi une militante très combattive dont la verve anticolonialiste et anti-raciste mettait en rage les fascistes et les « ultras » de ce quartier qui deviendra malheureusement un fief de la sinistre OAS.

Revenu en Algérie tout juste après l’indépendance, le 5 juillet 1962, les premiers gestes de Fernand, de jeune porté par l’enthousiasme et l’engagement politique conscient furent de demander la nationalité algérienne et de participer à l’édification d’un secteur industriel public comme moteur de la l’émancipation économique de l’Algérie. C’est ainsi qu’il entendait contribuer concrètement à la lutte pour le socialisme dans son pays natal. En qualité d’ingénieur au sein de la SN Métal, une entreprise publique stratégique, il toucha du doigt les dures réalités de cette œuvre face au sabotage sournois d’une catégorie de responsables algériens dont le seul rêve était d’amasser des privilèges et des richesses en arrimant l’Algérie aux multinationales. Ce qui l’amena à consacrer ses capacités intellectuelles et son expérience pratique à formation des étudiants de l’Université des Sciences et de la Technologie Houari Boumediene de Bab Ezzouar, à leur sensibilisation à la tâche décisive de l’industrialisation du pays.

Au sein du PAGS, et dans moments les plus difficiles de la clandestinité il fut un collaborateur très vigilant de son premier secrétaire, Sadeq Hadjerès. Jovial, très communicatif, plein d’humour, d’esprit caustique et auto-critique, très fier pour son combat au sein du PAGS, il ne s’était cependant jamais vanté des tâches accomplies en contact direct avec l’état-major de son parti. Ces tâches l’exposaient pourtant à tout moment aux risques d’arrestation, de supplices et surtout du traitement hargneux que les tortionnaires faisaient subir aux militants communistes d’origine européenne. Il n’était pas rare que ce traitement était le prélude à leur expulsion vers la « métropole » que souvent ils n’avaient connue que pendant les années d’emprisonnement ou de résidence forcée durant la guerre de libération.

Après la légalisation du PAGS en 1989, Fernand participa avec l’ardeur qui lui était propre à la bataille politique pour gagner les jeunes et les travailleurs aux idées de son parti. Il se heurta frontalement aux obscurantistes dont le régime avait favorisé la prolifération pour contrer les communistes.
Face aux menaces physiques qui le visaient explicitement il dut quitter à contre-cœur l’Algérie en 1993 pour s’installer à Montpellier.

La victoire de la contre-révolution en URSS, si elle l’a déconcerté un moment, si elle l’a amené à se poser beaucoup de questions sur les causes de cette défaite, ne l’a cependant pas poussé à renier ses idées. Il a conservé ses convictions fortifiées par le contact avec la réalité aveuglante des inégalités de classe croissantes en France, de l’exploitation forcenée, de l’impasse dans laquelle le capitalisme a placé l’humanité à l’échelle mondiale. Même s’il n’avait pas de vie militante organique, il fondait ses espoirs dans le renforcement du mouvement communiste international dont il suivait de près les difficultés et l’évolution. Il méditait avec une grande admiration l’exemple des luttes animées par le PC de Grèce.

Fernand a été un ami fidèle d’Alger républicain. Il lui prodiguait un soutien inconditionnel.
Un hommage lui sera rendu ultérieurement.

Les obsèques de Fernand auront lieu au funérarium de Sète dans l’intimité imposée par les mesures contre l’épidémie du covid-19.

Alger républicain, son directeur, Zoheir Bessa, présentent à Khaled, Nassim et Rédha, à toute la famille de notre ami Fernand disparu, leurs condoléances les plus attristées.

21 mars 2020