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Colombie : Une prospérité qui déracine
dimanche 1er juillet 2012
Trente mille soldats colombiens, ayant juré défendre la patrie et les intérêts des citoyens, parcourent en sueur, chargés d’armes achetées aux USA, en Espagne ou en Israël, les forêts et territoires où les entreprises étrangères extraient pétrole, or, charbon, argent et bois.
Certains parviennent à être envoyés comme mercenaires pour protéger les forages de ces mêmes compagnies au Moyen-Orient. Ils y font la même chose, mais perçoivent leur salaire en dollars. Ils protègent les oléoducs pour éviter les attentats, surveillent les natifs, toujours non conformes, toujours enclins à se soulever contre le saccage.
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Dans les villes colombiennes, une armée privée, composée d’un demi-million de surveillants de sécurité, connus sous le nom de “guachimanes”, surveillent, avec quatre-cent mille soldats et policiers, les banques (majoritairement de capital espagnol), les universités, les hôpitaux, les sièges d’entreprises, les entrepôts des grandes chaînes de distribution, les villas et les maisons closes. Pas une rue des quartiers touristiques ou d’affaires n’échappe aux patrouilles de ces ex-militaires reconvertis en surveillants privés, embauchés par des “officiels”, hauts fonctionnaires, propriétaires d’entreprises de sécurité. Des hommes et des femmes bien armés et entrainés, en communication radiotéléphonique avec la police et ses commissariats, détenteurs d’armes à feu, de matraques, et de féroces dobermans ou rottweilers.
Malgré toute cette sécurité, tombent, impunément assassinés, les syndicalistes qui exigent aux multinationales le respect des droits des travailleurs, des indigènes, des noirs, des homosexuels et par-dessus tout, des agriculteurs qui réclament la restitution de leurs terres spoliées, desquelles ils furent délogés moyennant terreur paramilitaire par les négociants en huile de palme, l’élevage intensif, les entreprises bananières et les exploitants de minerais.
Le déplacement massif et forcé de plus de cinq millions de personnes n’engendre pas seulement un sérieux problème de respect des droits de l’homme, faisant de la Colombie le pays au monde qui comporte le plus de migrations internes ; c’est avant tout une stratégie de guerre pour dépeupler les zones offertes aux investissements du capital international qui, selon le gouvernement, apporteront la “prospérité pour tous”.
Un demi-million de Colombiens ont fui la persécution (menaces, assassinats, terreur) et résident à l’étranger. Près de douze mille colombiens sont parvenus l’année dernière à traverser les fleuves San Miguel et Putumayo pour demander, angoissés, l’asile à l’Équateur. Des dizaines de milliers d’autres fuient vers le Venezuela ou le Panama. A peine la moitié obtient le statut de réfugiés.
La majeure partie des personnes déplacées par le conflit armé interne et par les projets d’investissement se retrouvent désemparées dans les pays où ils ont parvenus à fuir. Ce sont des populations vulnérables, femmes et petites filles victimes des réseaux d’exploitation sexuelle, hommes et petits garçons soumis aux emplois précaires de l’agro-industrie, quand ils ne sont pas captés par les réseaux de délinquance, ou recrutés pour la guerre par des groupes armés illégaux.
En cette journée du réfugié, nous affirmons que la Colombie est aujourd’hui un pays sûr pour les investisseurs mais pas pour la population appauvrie des agriculteurs, indigènes, noirs, syndicalistes ou membres d’autres “minorités” pour lesquelles la consigne du développement et de la prospérité s’est convertie en synonyme d’armement, terreur et exil.
Collectif des réfugiés colombiens aux Asturies (Espagne) “Luciano Romero Molina”
Javier Orozco Peñaranda., Yuveli Muñoz Pardo, Yuri Neira Salamanca. Xixón, Asturias,
20 juin 2012
Traduit de l’espagnol par L. Marthe pour Investig’Action
Source : Investig’Action
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