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L’éditorial de Zoheir Bessa. Juillet 2009.
vendredi 7 août 2009, par
Détresse d’un peuple et d’une jeunesse face à un régime qui n’aime pas son pays ou dont il n’aime que la rente pétrolière
En ce 47ème anniversaire de l’indépendance arrachée le 3 juillet 1962, après une longue et meurtrière guerre de libération, quelles sont les perspectives d’avenir pour les couches sociales laborieuses et la jeunesse ?
La colère face aux inégalités grandissantes de même que l’absence totale de confiance dans la volonté des hommes du régime de se pencher sur leur sort, sont les deux aspects de leur état d’esprit.
Cette colère et cette méfiance sont légitimes. Le régime ne peut justifier les résultats désastreux de sa politique sur tous les plans. Ce sont d’ailleurs ses choix de classe qui sont à l’origine des problèmes auxquels les masses sont confrontées. Et ce, au moment où l’Algérie dispose de formidables moyens pour liquider la dépendance et l’arriération économiques. A l’inverse, avec cent fois moins de moyens financiers, sans parler de l’absence d’encadrement et d’expérience, et malgré de nombreuses erreurs qui pouvaient être évitées, l’Etat algérien avaient montré durant les 15 premières années de l’indépendance qu’il était possible d’éradiquer le chômage et de réduire la pauvreté.
Machine de répression au service d’une petite minorité de profiteurs et d’accapareurs sans foi ni loi, l’État actuel n’est animé d’aucune volonté d’en finir avec la misère, de sortir le pays de l’impasse dans laquelle il l’a mené. Bien au contraire, il entretient obstinément le chômage à seule fin de maintenir par la faim et les frustrations la jeunesse et les travailleurs dans un état de soumission, de résignation, voire de servilité. Il agit de façon méthodique pour répandre dans les esprits une mentalité d’esclaves qui fait prospérer une minorité de nouveaux nantis aux dents acérées.
Pourquoi s’étonner que face au verrouillage de la vie sociale, à la fraude électorale grossière et à la surdité arrogante des dirigeants, les jeunes cherchent par tous les moyens à s’embarquer vers d’autres rivages ? Ce n’est pas leur pays qu’ils n’aiment pas. Ils fuient des gouvernants qui eux n’aiment vraiment pas leur pays ou qui ne l’aiment que dans la mesure où il ne représente pour eux qu’une pompe d’aspiration des pétro-dollars au profit des plus riches. Et quand les jeunes sont sauvés de la noyade après avoir raté leur “évasion”, leur destination est la prison. Car le pouvoir n’a rien trouvé de mieux pour régler les problèmes de la “harga” que de pondre une loi qui punit les candidats à l’émigration clandestine.
Que reste-t-il à faire : brûler les édifices publics, symboles d’un État étranger à leur sort, couper les routes, se taillader publiquement la poitrine à l’aide de couteaux aiguisés, s’asperger collectivement d’essence et menacer de s’immoler en masse ?
La colère ne fait que monter chaque jour un peu plus. Le pouvoir a lancé de fermes avertissements après la « victoire » électorale de son candidat avec un score digne de Omar Bongo ou de Hosni Moubarak : il ne tolèrera plus les manifestations de rue et sa seule réponse aux manifestants sera la prison, encore la prison, toujours la prison.
Plus grave maintenant est la multiplication des signes de diversion pour diviser les masses, les jeter les unes contre les autres, ou les occuper autour de trouvailles savamment calculées. Comme par hasard, des heurts violents opposent depuis quelques mois les deux composantes de la population du Mzab. Des bagarres sont suscitées à la sortie des stades par des éléments aux liens douteux. La bigoterie est cultivée par des walis pour focaliser sur de fausses préoccupations. Les bars sont désignés comme la source de tous les maux sociaux et fermés l’un après l’autre pendant que la consommation de la drogue explose de façon exponentielle. Des responsables officiels organisent et animent des manifestations carnavalesques autour des prouesses de l’équipe nationale de football. Le patriotisme est quotidiennement bafoué face aux magouilles des multinationales installées en Algérie, aux interventions des ambassadeurs des puissances impérialistes qui se permettent de faire des remontrances à un pouvoir tombé bien bas ou face encore aux « aides » des USA ou de l’Union Européenne à une multitude d’associations appelées à jouer un jour ou l’autre le rôle de chevaux de Troie de ces puissances, sans que ce pouvoir n’ose rappeler à l’ordre ces singuliers bienfaiteurs. Le nationalisme chauvin ou d’apparat est quant à lui exalté quand cette équipe bat celle de la Zambie ou de l’Égypte.
Il faut continuer à travailler avec persévérance, et sans céder aux découragements, à des changements radicaux pour réaliser les aspirations des masses laborieuses et de la jeunesse en cet anniversaire d’un évènement qui marquera de façon indélébile la conscience progressiste du peuple algérien.