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Les syndicalistes la zone industrielle de Rouiba se rassemblent devant le siège central de l’UGTA*
samedi 7 janvier 2012
Les travailleurs exigent des commissions d’enquête pour faire la lumière sur la gestion des entreprises de la zone industrielle. 10 jours est le délai accordé aux pouvoirs publics pour régler les conflits. Faute de quoi, les 40 000 travailleurs investiront la rue. Pis, une action commune avec le complexe d’El-Hadjar est envisageable.
Totale réussite de la démonstration de force des travailleurs de la zone industrielle de Rouiba. La cour du siège de la Centrale syndicale s’est avérée exiguë pour contenir le flux des syndicalistes et autres travailleurs venus pour manifester leur solidarité avec leurs collègues de la SNVI. 8 heures tapantes, le quartier de la place du 1er-Mai était déjà quadrillé par un important dispositif sécuritaire. Les travailleurs arrivent par petits groupes notamment en bus qui les déposaient à l’entrée de la Centrale syndicale.
L’afflux prend des proportions au fil des minutes. De petits groupes se forment. Les discussions entre les travailleurs de tous âges vont bon train. Le sujet est le même : les problèmes socioprofessionnels et surtout les abus des dirigeants imbus de leur personne qui n’ont qu’un seul objectif : continuer à ramasser, voire détourner l’argent du pauvre salarié. Au fil des heures, une véritable marée humaine a couvert toute la cour de la Centrale syndicale. 3000 à 4 000 manifestants étaient sur les lieux à en croire les estimations de certains syndicalistes. Et il faut préciser, à ce propos, que ceux qui ont fait le déplacement hier à la Maison du peuple ne représentent que le 1/1 000e.
“Nous n’avons pas voulu lancer l’appel à tous les travailleurs. Nous nous sommes contentés de quelques diverses entreprises publiques et privées de la zone”, nous dit le représentant de la zone de Rouiba. L’excitation était à son comble et les manifestants commençaient à s’impatienter. Ils n’attendaient que le feu vert pour agir et extérioriser toute leur colère. Selon les syndicalistes de la zone, les travailleurs étaient déterminés à faire une marche vers le ministère de l’Industrie pour interpeller le ministre de tutelle.
A 9h30, la cour étant archicomble, les syndicalistes de la SNVI et de la zone de Rouiba, Benmiloud et Messaoudi, chauffent la foule qui n’attendait que cela. “Ouvrez les portes, la zone arrive” ou encore “Ouvrez les portes, l’Algérie arrive”, sont repris en chœur et de tout cœur. Mais les slogans qui revenaient sans cesse et sur lesquels les manifestants ont insisté sont : “Retraité dégage”, “Double salaire dégage” ou encore “SGP dégage”, “Laissez la place aux jeunes”, “Bouteflika débarrasse nous des vieux pour que les jeunes travaillent”.
La colère des travailleurs de la zone de Rouiba s’explique par divers dépassements et intimidations des principaux responsables, mais tous sont unanimes à dire que le profond malaise trouve son origine dans ce qu’ils qualifient de “hogra des cadres dirigeants et des responsables des Sociétés de gestion des participations (SGP)”. La solution réside dans “le départ des SGP”, scandent à tue-tête les manifestants.
Pendant près d’une demi-heure, les “invités” de la Maison du peuple ont soumis leurs cordes vocales à rude épreuve en scandant des slogans qui en disent long sur leur calvaire au quotidien. Dans la foulée, un des syndicalistes lâche “Sidi-Saïd y a zaïm”. Il est tout de suite hué par la foule qui n’a pas apprécié que le SG de l’UGTA ne vienne pas en personne pour les soutenir. Pas la peine de rendre hommage à un absent, commentent certains manifestants.
Les cadres dirigeants doivent rendre des comptes.
Prenant la parole devant la foule, Miloudi lance : “Il y a des parties occultes qui veulent pousser au pourrissement. Les syndicats posent des problèmes socioprofessionnels et personne ne peut les manipuler”. Il revient sur la non-application de la loi relative à l’exercice du droit syndical. “Comment peut-on interdire en 2011 la mise en place de sections syndicales dans des entreprises publiques ?” Selon lui, plusieurs travailleurs ont été licenciés par leurs supérieurs pour leurs activités syndicales. Ce matin même, 5 travailleurs licenciés passent devant le tribunal de Rouiba. Pour l’orateur, “il n’est plus question de demander uniquement le départ des cadres dirigeants retraités, mais il faut qu’ils rendent des comptes. Des commissions d’enquête seront exigées car les dépassements sont énormes”.
Il cite à ce propos le cas de ce P-DG retraité rappelé pour un mandat de six années. “Il a falsifié son dossier de retraite pour toucher une pension de 12 millions de centimes au lieu de 8. Ceci outre le salaire qu’il touche actuellement pour licencier les jeunes”. Un document prouvant ces dires a été remis hier au SG de l’UGTA par les syndicalistes. Sollicité pour une prise de parole, Salah Djenouhat se contentera de préciser que “le rassemblement d’aujourd’hui ne vise pas des revendications salariales mais l’application des lois notamment celle relative au droit syndical”.
Vers une action commune avec le complexe d’El-Hadjar
Rencontré à la Centrale syndicale, le patron du syndicat du complexe sidérurgique d’Arcelor Mittal, Smaïn Kouadria, nous a révélé que “si aucune suite officielle n’est donnée au rassemblement d’aujourd’hui, une action commune entre le complexe d’El-Hadjar et la zone industrielle de Rouiba sera lancée”. Et d’ajouter : “Nous avons fait le déplacement à la Centrale syndicale pour apporter notre soutien aux travailleurs de la zone de Rouiba.”
Décidés à aller jusqu’au bout de leur combat, les syndicalistes de Rouiba ont fixé un ultimatum de 10 jours aux pouvoirs publics. “Sinon le match retour sera joué à la zone industrielle de Rouiba et nous allons gagner. Car cette action n’est qu’un début à ce qui va se passer en cas de non-satisfaction de nos revendications”, lance Miloudi, avant de remercier la foule et d’annoncer la fin de l’action de protestation.
Malika Ben
in Liberté du 27 décembre 2011
* Le titre est de la rédaction d’Alger républicain