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Oscar Fortin : « La Ligue arabe est sous le contrôle de l’Occident »
mardi 13 mars 2012
Vers une décision unilatérale ? La crise syrienne ne cesse de connaître des rebondissements, notamment après le mutisme et le mépris affichés par la Ligue arabe sur le rapport de ses observateurs et le recours au conseil de sécurité pour arracher une résolution permettant d’intervenir en Syrie. Une dissonance qui, apparemment, trahit vivement les intentions d’un occident prédateur de connivence criminelle avec une Ligue arabe soumise à un agenda prédéfini sous la bannière d’interventions « humanitaires ». Quelle marge de manœuvre leur reste-il dans ce cas ? Questions que nous avons étayées avec Oscar Fortin, spécialiste canadien en sciences politiques ayant travaillé dans diverses organisations de coopération internationale, dont plusieurs années au ministère des relations internationales du Québec.
La Nouvelle République : Comment expliquez-vous le silence de la Ligue arabe, de l’Occident et des médias occidentaux sur le rapport des observateurs de la Ligue arabe ?
Oscar Fortin : Votre question est plus que pertinente. Personne ne peut se réfugier en disant qu’il en ignorait l’existence, encore moins son contenu qui circule sur le Web depuis plusieurs jours. Alors, pourquoi ce silence sur ce rapport qui, au moment même où le Conseil de sécurité discute de cette crise en Syrie, dénonce les crimes qui y sont commis, fait état de ce qu’en rapportent les médias et certaines organisations non gouvernementales ?
N’était-il pas dans l’intérêt de tous les membres du Conseil de sécurité et des médias, en appui à leur témoignage, de faire également appel au rapport de ces 166 observateurs arabes ayant sillonné le territoire syrien pendant près de quatre semaines ? Leur crédibilité n’était-elle pas de nature à rassurer la communauté internationale sur les véritables motifs d’une intervention en Syrie ? Il n’en fut rien et nous savons pourquoi.
C’est que ce rapport vient contredire, sur plusieurs points, les informations véhiculées dans les discours officiels et dans les médias qui s’en font l’écho. En voici quelques extraits :
« 26) La mission a observé dans les deux secteurs de Homs et Hama des actes de violence du fait des groupes armés contre les forces gouvernementales, qui ont fait des tués et des blessés parmi les troupes gouvernementales. Dans certaines situations, les forces gouvernementales ont recours à la violence comme réaction aux attaques perpétrées contre ses membres. Les observateurs de la mission ont noté que les groupes armés ont recours aux bombes thermiques et aux missiles anti-blindage.
27) La mission a été témoin dans les secteurs de Homs, Idlib et Hama des actes de violence contre les troupes gouvernementales et contre les citoyens entraînant de nombreux décès et blessures. C’est le cas de l’explosion de l’autobus civil tuant huit personnes et blessant plusieurs autres, dont des femmes et des enfants, du sabotage à l’explosif d’un train chargé du transport du diesel ainsi que d’autres événements à Homs, dont la destruction de l’autobus de la police tuant deux d’entre eux, de l’attaque à l’explosif du pipeline de carburant et autres attentats de moindre importance.
28) La mission a noté l’émission de faux rapports émanant de plusieurs parties faisant état de plusieurs attentats à la bombe et de violence dans certaines régions. Lorsque les observateurs se sont dirigés vers ces zones pour enquêter, les données recueillies ont montré que ces rapports n’étaient pas crédibles.
29) La mission a noté également, en se basant sur les documents et les rapports émanant des équipes sur le terrain, qu’il y a des exagérations médiatiques sur la nature et l’ampleur des accidents et des personnes tuées ou blessées à la suite des événements et des manifestations qui ont eu lieu dans certaines villes. » En clair, c’est qu’il y a en Syrie des groupes armés qui n’ont rien à voir avec une opposition pacifique réclamant des réformes qui s’imposent. Ces groupes reçoivent des armes de l’extérieur pour y semer la terreur au sein de la population civile, entraînant ainsi l’armée à intervenir et à user de la force.
L’information, véhiculée à l’extérieur, vient appuyer cette opposition et reporte toute la violence sur l’armée et le gouvernement. Ainsi, ce rapport conduit à des conclusions toutes autres de celles recherchées par Washington et la Ligue arabe. Il renforce l’approche de la Russie qui demande le désarmement des groupes armés et l’amorce de discussions entre toutes les parties syriennes impliquées. Dans une conférence de presse, toute récente, le président du groupe d’observateurs a rappelé que l’intervention de l’armée syrienne répond, d’abord et avant tout, à ces groupes armés qui sèment la terreur dans le pays. Il a de nouveau rappelé que les membres, dont plusieurs organismes non gouvernementaux œuvrant pour les droits humains, ont voulu donner un portrait réaliste et crédible de la réalité telle qu’observée lors de leur mission.
Ce silence des pays occidentaux et de la Ligue arabe sur ce rapport confirme que son contenu ne leur était d’aucune utilité pour mener à terme leur projet de changement de régime en Syrie. Il n’était pas pertinent à leur agenda et mieux valait en taire le contenu et, dans le cas de sa diffusion, d’en discréditer leurs auteurs. Déjà. en janvier dernier, un article sur www.afrique-asie.fr apportait des informations confirmant une présence active de l’Occident dans la mobilisation de groupes armés.
LNR : Ce rapport semble contredire les attentes de l’Occident. Cette dissonance, en fait, semble trahir les intentions de l’Occident avec la complicité de la Ligue arabe qui semblent buter sur une aporie de fond par rapport à ce qu’on essaye de défendre sous l’hymne humanitaire. En d’autres termes assiste-t-on à la fameuse fable de Jean de La Fontaine « Le loup et l’agneau » ?
Oscar Fortin : Pour qui prend du recul par rapport aux tensions qui alimentent les conflits un peu partout sur notre planète Terre, il y a ce constat, toujours plus évident et plus clairement défini, d’une polarisation de deux grands antagonismes qui se disputent le destin du monde.
En ce sens, c’est l’humanité entière qui arrive à la croisée des chemins. Les maîtres de ce monde ne peuvent se résigner à ce que des peuples et des personnes puissent reprendre le contrôle de leurs droits, de leurs libertés et décider par eux-mêmes d’un avenir sur lequel ils n’auraient plus de prise.
Dans le système actuel, ils en contrôlent encore les principaux leviers et peuvent ainsi, tout en donnant l’impression d’être les gardiens des droits des uns et des autres, en disposer à volonté. Mais voilà que les peuples s’éveillent et que la conscience s’ouvre de plus en plus à la dimension humanitaire, tout autant dans sa profondeur que dans son universalité. J’ai eu l’occasion, récemment, d’écrire une réflexion qui décrit cette croisée des chemins en m’inspirant de la prédiction Maya et de l’apocalypse.
Dans ce combat, les médias sont devenus l’arme prédominante et ce n’est pas pour rien que leur contrôle soit si important. Ils sont l’outil par excellence pour modeler les cerveaux et les esprits des personnes. Un combat féroce se livre actuellement dans le monde des communications pour contrôler entièrement l’information qui circule et, par elle, les esprits. L’issue de ce combat appartient encore à l’inconnu. Si les maîtres actuels du monde ont le contrôle d’une grande partie de la presse écrite et télévisuelle, ils butent cependant sur le contrôle du virtuel.
L’information alternative les dérangent beaucoup parce qu’elle met à nue leur hypocrisie et leurs mensonges un peu comme le fait le soleil du matin avec la brume qui dissimule les marécages. La lutte pour la vérité, tout comme celle pour dissimuler le mensonge, met à l’épreuve les plus grands spécialistes du « virtuel ». C’est à qui parviendra le mieux à contrôler l’outil et le message. Alors, pour répondre directement à votre question, le loup n’aime pas beaucoup qu’on le démasque sous la peau de l’agneau et que l’on mette à nu ses projets diaboliques. Il ne peut se défaire de son image de « bon pasteur » sans perdre par la même occasion son emprise sur les peuples. Il y a en cela un réel combat de la vérité contre le mensonge, de l’authentique contre le maquillage, du juste contre l’injuste, du bon contre le mauvais.
LNR : Côté israélien, Ehud Barak a réaffirmé que la fin du régime syrien d’Assad est proche. Le même discours a été répété en chœur par Alain Juppé, Hillary Clinton et l’émir du Qatar. Maintenant, au Conseil de sécurité, ces mêmes parties semblent déstabilisées face au véto russe. Quelle marge de manœuvre leur reste-il dans ce cas ? Pourraient-ils outrepasser les décisions du Conseil et intervenir comme l’ont fait les Etats-Unis en Irak ou éventuellement contourner cette impasse en invoquant la résolution 377A « union pour la paix » qui a été utilisée pour autoriser « l’utilisation de la force armée » en Corée ?
Oscar Fortin : Je ne saurais dire ce qui va effectivement se passer. En général, ces gens qui commandent les pays occidentaux ont toujours plusieurs cartes dans leur chapeau, aidés en cela par une absence complète de morale. Avec eux, tout est possible. La corruption, l’assassinat, le mensonge, les trahisons et la manipulation ne sont que quelques armes dont ils connaissent parfaitement le maniement.
Ce que je sais, toutefois, c’est que le monde a changé et que l’usage de ces armes devient de plus en plus difficile. Personne ne veut passer pour un assassin, un manipulateur, un tricheur, un opportuniste ou un prédateur. Ce qui pouvait se faire dans la clandestinité, sans trop de problèmes, est devenu beaucoup plus compliqué. On n’a qu’à voir le peu de temps que prennent les spécialistes des montages de toute nature pour en détecter la véracité ou le trucage. L’histoire des nombreux montages faisant parler Ben Laden tout comme celui tout récent de la prise de la place verte de Tripoli en Libye et bien d’autres encore démontre qu’il est toujours plus difficile de produire le mensonge parfait, la dissimulation sans faille.
L’histoire de Wikileaks et de son créateur, Julien Assange, révèle que les chambres fortes des secrets d’Etat et que le magouillage dans les coulisses du pouvoir ne sont plus à l’abri de personne et qu’ils peuvent se retrouver étalés dans l’opinion publique au moment le plus inattendu. Ce n’est pas pour rien que les autorités en place essaient de faire taire par tous les moyens ceux qui s’y sont risqués et de faire peur à ceux qui voudraient s’y aventurer.
En conclusion, je fais mienne cette opinion d’Amin Hoteit, libanais, analyste politique, expert en stratégie militaire et général de brigade à la retraite. Il croit que l’Occident devra faire son deuil de son échec à vouloir répéter en Syrie le scénario utilisé en Libye, scénario, on s’en souviendra, qui avait bien plu à Obama.
LNR : Le représentant de Damas a ironiquement déploré lors de la dernière réunion du Conseil de sécurité que « les Arabes ne soient pas venus pour défendre les Palestiniens face aux Israéliens ». Qu’est-ce qui les empêcherait, d’après vous, d’intervenir dans la défense des droits palestiniens ?
Oscar Fortin : A partir du moment où la Ligue arabe est sous contrôle de l’Occident et que ses principaux dirigeants marchent main dans la main avec Washington, il est peu surprenant qu’elle se soit abstenue d’intervenir dans le cas de la Palestine. Déjà, les États-Unis avaient pris position en faveur d’Israël et s’étaient prononcés contre la résolution visant la reconnaissance de l’Etat palestinien. Il ne fait aucun doute que la Ligue arable a été discrètement invitée à s’abstenir de toute manifestation en appui à la requête de la Palestine. Tout cela ne s’est pas fait sans une concertation entre les trois principaux intervenants : Israël, Washington et la Ligue arabe. Comme le disent certains textes anciens : « Aucun homme ne peut servir deux maîtres : car toujours il haïra l’un et aimera l’autre ». Dans un autre contexte, G.W. Bush disait à peu près la même chose : « Il y a ceux qui sont avec nous et ceux qui sont contre nous. Dans le premier cas ils sont nos amis et dans le second cas ils sont nos ennemis ».
LNR : Les États-Unis et leurs alliés « appellent à la guerre » au plus fort d’une dépression économique mondiale. Ne pensez-vous pas qu’une nouvelle guerre contre la Syrie et l’embrasement de la région contribueraient à l’aggravation de cette crise ?
Oscar Fortin : Je ne suis pas économiste pas plus que je ne suis dans le secret des finances du complexe industriel militaire des États-Unis. Une chose est toutefois certaine, ils ne vont pas en guerre pour faire la charité, pas plus que pour sauver des vies humaines. Au contraire toutes les guerres de ces dernières décennies ont laissé des centaines de milliers de morts et autant, sinon plus, de blessés. S’ils vont en guerre c’est pour conquérir quelque chose qui permettra de payer amplement les coûts encourus.
Si nous prenons l’exemple de la Libye, nous réalisons que toutes les dépenses encourues par les pays de l’Otan et les États-Unis ont été les premières à être remboursées à même les fonds libyens. Ainsi, leur industrie militaire fonctionne sur des budgets qui viennent de l’extérieur. On dit même que les 10 000 marines qui s’étaient rendus au large d’Haïti pour y assurer la sécurité ont été les premiers à se faire rembourser par les dons remis pour venir en aide aux victimes du tremblement de terre de janvier 2009. Je pense qu’une étude sérieuse sur ce qui leur en coûte pour faire la guerre nous révélerait fort probablement que leurs principaux bailleurs de fonds sont les victimes de leurs interventions. Quant à la crise économique, il faut en chercher la cause dans le système capitaliste lui-même dont la nature est l’enrichissement sans fin des uns aux dépens des autres.
LNR : Certains pensent que « la vraie menace à la sécurité mondiale provient de l’alliance des États-Unis, de l’Otan et d’Israël ». Partagez-vous cet avis ?
Oscar Fortin : Je pense que la véritable menace à la sécurité mondiale vient du désordre entretenu par une minorité qui en tire tous les avantages. C’est un peu le message des « indignés » aux États-Unis et en Europe, du M 15 en Espagne, des étudiants à Santiago du Chili… Les injustices, les mensonges, la manipulation, la cupidité qui s’imposent au monde d’aujourd’hui portent le germe de tout ce qui détruit l’humain et génèrent inévitablement un réveil des consciences et des peuples qui disent : « Assez, c’est assez ! »
En Amérique latine, nous assistons à l’émergence de cette nouvelle humanité et de ce nouveau monde. Les pays émergents tels le Venezuela, la Bolivie, l’Équateur et le Nicaragua ont réussi, par le système démocratique existant, à prendre le pouvoir. La première initiative a été de doter le pays d’une nouvelle Constitution, rédigée, cette fois-ci, par des représentants du peuple et acceptée par le peuple à travers un référendum. Une loi fondamentale qui ne répond plus prioritairement aux intérêts d’oligarchies, mais à ceux de tout un peuple.
En second lieu, ce fut de modifier les mécanismes de représentation démocratique par des mécanismes de participation démocratique. Ainsi, les élus (es) n’ont plus un chèque signé en blanc pour les 4,5 ou 6 années de leur mandat, mais seront constamment talonnés (es) par les divers regroupements et organismes représentatifs de la société qui disposeront de pouvoirs pouvant aller jusqu’à la destitution de ces mêmes élus. Ils n’en sont plus à une démocratie représentative qui n’a plus rien de démocratique, mais à une démocratie participative.
Dans le cas de la Bolivie, la participation s’étend jusqu’à la nomination des principaux juges des diverses cours, élus au suffrage universel. Ces derniers sont, ainsi, totalement indépendants des pouvoirs politiques et peuvent exercer leurs fonctions de juge en ayant à n’y répondre qu’au peuple. Ce n’est pas pour rien que ces pays font l’objet de menaces constantes en provenance de Washington et de ses alliés en Europe.
Il est certain que le noyau dur de la résistance au changement et au transfert des pouvoirs, passant des oligarchies au service du capital à celle des peuples au service du bien commun, n’est pas de nature à plaire aux premiers. Ils y voient une attaque frontale à leurs prérogatives de diriger le monde et d’en fixer ce qui est bon et ce qui est mauvais.
La forme institutionnelle et visible de ce noyau dur se retrouve principalement dans cette alliance entre Washington, les pays membres de l’OTAN et Israël. Autour d’eux gravitent tous ces pays et organismes régionaux sur lesquels ils exercent un grand pouvoir et sur lesquels ils peuvent compter pour jouer un rôle important dans la mise en place des politiques planifiées et décidés par eux.
Au Moyen-Orient on peut penser à l’Arabie saoudite, au Qatar, à la Ligue arabe et à bien d’autres. En Amérique latine, il y a l’Organisation des États américains (OEA), le Chili, la Colombie, le Costa Rica, le Honduras, le Panama et le Mexique qui se prêtent actuellement à cette couverture. Toutefois, dans cette région, tout peut changer rapidement. Pour le moment, ce sont de bons alliés et la presse oligarchique couvre l’ensemble du territoire avec la désinformation idéologique qui la caractérise.
LNR : En sus des déclarations des diplomates, les médias occidentaux ont contribué activement à dissimuler la nature de l’interférence étrangère en Syrie, incluant le soutien extérieur aux insurgés armés. D’après vous, cette campagne de déstabilisation de la Syrie obéit-elle à un agenda prédéfini ? Si oui, quels en seraient les enjeux ?
Oscar Fortin : Je ne suis pas dans le secret des dieux pour en connaître les visées secrètes. Il y a beaucoup d’analyses sur ce sujet. Pour l’essentiel, la prise de contrôle de la Syrie a à voir avec cette autre confrontation à venir avec l’Iran. Des objectifs géopolitiques pour le contrôle de tout le Moyen-Orient serait à la base de cette nouvelle offensive. Je me permets de vous référer quelques articles sur le sujet :
http://www.etudes-geopolitiques.com/article5.asp
http://www.vigile.net/Menacer-l-Iran-et-preparer-l
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va& ;aid=26853.
LNR : La soi-disant « communauté internationale » soutient une « guerre humanitaire ». Au lieu d’être condamnée comme un acte criminel, ses principaux acteurs sont primés pour leur « tribut à la paix mondiale ». Que pensez-vous de cette approche ?
Oscar Fortin : Ce fait que vous rapportez vient confirmer l’emprise qu’ont les forces de l’empire occidental sur à peu près toutes les organisations qui ont un mot à dire sur les droits des personnes et des peuples. De leur position de force, ils peuvent en contrôler les interventions et les contenus des messages à diffuser. Il n’y a pas si longtemps, je participais à une table ronde portant sur l’Amérique latine. Une initiative prise par l’Université Laval. Au nombre des panélistes, il y avait le correspondant de Radio Canada qui couvre l’ensemble des pays de l’Amérique latine depuis des années. Dans la présentation qu’en a faite le président du panel, il a mis en relief le prix qu’une université américaine lui avait remis pour la qualité de ses reportages.
Or, dans tous ses reportages, il répond à merveille aux intérêts des politiques états-uniennes dans cette région du monde. Il sait diaboliser les adversaires, tout particulièrement le président Chavez, chef de file des pays émergents. S’il y a ce qui est couvert par le journaliste, il y a tout ce qui n’est pas couvert. Cette dernière partie est sans doute plus importante que la première car elle concerne directement l’information. Dans cet esprit, ils peuvent s’octroyer toutes les reconnaissances qu’ils veulent bien et les refuser à d’autres, qui, tout en les méritant bien, sont placés sur la liste noire.
Qu’Obama ait été honoré du prix Nobel de la paix avant même d’avoir amorcé quoi que ce soit qui puisse le classifier à pareil titre indique que ces instances obéissent à des pouvoirs qui n’ont que faire de l’éthique et des objectifs d’organismes humanitaires. Il en va de même avec les cours de justice internationale auxquelles ils se refusent de se soumettre tout en décidant d’y soumettre leurs ennemis.
LNR : Vu les événements auxquels nous assistons actuellement avec notamment ces « révolutions » arabes qui risquent également de s’étendre en Afrique et un peu partout dans le monde, pourrait-on avancer qu’on assiste à la réalisation d’ambitions secrètes des États-Unis ?
Oscar Fortin : Il est actuellement difficile de dire ce qu’est véritablement le peuple états-unien. Comme bien d’autres peuples, il se laisse diriger sans trop se poser de questions. Il va voter, mais toujours avec un faible taux de participation, comme s’il lui importait peu les résultats. Les campagnes électorales se ramènent à de véritables spectacles qui engloutissent des centaines de millions de dollars en propagande et en publicité. Une très bonne affaire pour les médias et l’image d’un pays qui fait élire ses élus.
Tout cela est bien beau et durera jusqu’au moment où il y aura quelque part une brisure entre le peuple et ce monde du spectacle électoral. Sont-ils arrivés à cette brisure ? C’est ce que semble refléter le mouvement des indignés qui n’accepte pas que le 1 % des plus riches de la planète décident du destin des autres 99 %. Il y a en cela une prise de conscience qui va bien au-delà des frontières qui définissent les États et les pays entre eux. Cette brisure apparaît particulièrement aux États-Unis et en Europe que la crise économique frappe de plein fouet. C’est tout le système qui est remis en cause.
Le capitalisme ne peut plus répondre aux demandes du monde d’aujourd’hui. La démocratie est devenue une vraie farce où les peuples n’exercent aucun pouvoir. Au-delà des institutions politiques et économiques qui opèrent à visage découvert, il y a, selon plusieurs, un pouvoir plus profond qui opère à visage masqué et qui tire les ficelles de l’Etat de droit ainsi que celles des principales institutions qui s’y rattachent. Trois ouvrages viennent nous en rappeler l’existence. Les deux premiers sont de Peter Dale Scott : « La Route vers le nouveau désordre mondial : 50 ans d’ambitions secrètes des États-Unis », traduction et actualisation de The Road to 9/11, le « Projet jugement dernier » et les événements profonds : JFK, le Watergate, l’Irangate et le 11 Septembre, et le troisième, tout récent, « Circus Politicus », est l’œuvre conjointe de deux auteurs bien connus comme journaliste de recherche, Christophe Dubois et Christophe Deloire.
Ces ouvrages nous font entrer dans ce monde de l’ombre qui a, à toute fin pratique, le plein pouvoir sur nos gouvernements, nos institutions financières, nos universités, nos cours de justice, nos médias et nos propres cerveaux. Ils n’ont à répondre à aucune loi, à aucun tribunal et disposent de tous les moyens pour éliminer ce qui leur semble de trop et consolider ce qui leur assure la pérennité. Rien de mieux pour les lecteurs et lectrices d’aller directement là où les auteurs expliquent eux-mêmes ce que leurs recherches leur ont permis de découvrir. Nous n’en sommes plus à la fabulation, mais à la mise à jour d’un monde qui s’est approprié la démocratie, les institutions de droit, les grandes instances multinationales, dont l’ONU, pour les mettre entièrement à son service. Dans le cas de Peter Dale Scott, vous trouverez la présentation qu’il fait lui-même de ses découvertes. Les vidéos sont sous-titrées en français : http://www.vigile.net/PETER-DALE-SCOTT-L-intelligence
Le second est présenté par les deux auteurs qui nous ouvrent un peu plus grande la porte sur les mains invisibles qui œuvrent à l’instauration d’un gouvernement mondial : http://www.agoravox.tv/actualites/politique/article/circus-politicus-demasque-les-33601
Je termine ce partage de réflexions en vous remerciant pour votre indulgence et votre compréhension.
Oscar Fortin