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SONATRACH L’arnaque de l’arbitrage international et le complot qatari

samedi 11 mai 2013

La production algérienne en gaz naturel subit tellement de pressions que la Sonatrach et sa tutelle ne sont plus en mesure de contenir.

Certaines compagnies menacent de quitter l’Algérie si elles n’obtiennent pas suffisamment de concessions. D’autres clients de Sonatrach se bousculent devant le tribunal d’arbitrage international afin d’obtenir des réductions sur le prix de vente du gaz. Le tout est couronné par l’action menée par le Qatar visant à exclure progressivement l’Algérie du marché international du GNL.

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Le chantage de BP

En 2006 déjà , les responsables de BP avaient prédit la déplétion du gaz algérien et savaient à l’époque qu’en 2017, la Sonatrach ne serait plus en mesure d’honorer ses contrats gaziers. Aujourd’hui, les responsables de cette compagnie utilisent cette carte pour obtenir des concessions inimaginables de la part de l’Algérie. En annonçant le report de la reprise de leurs investissements en Algérie, les responsables de BP pensent surtout aux textes d’application de la nouvelle loi sur les hydrocarbures. La compagnie britannique compte investir dans les gaz non conventionnels dans le périmètre de Bourarhat, dans le bassin d’Illizi, et maintient la pression sur les autorités algériennes pour obtenir le maximum de facilités fiscales. Bourarhat Sud (les blocs 230 et 231, non loin du complexe de Tiguentourine) présente un enjeu de taille pour BP, en raison de son énorme potentiel en gaz de schiste. Ce gisement de gaz non conventionnels est estimé à 52 Tcf, soit le même volume que les réserves actuelles de Hassi R’mel. Le contrat d’association sur l’exploration de ce gisement a été signé le 23 avril 2005 pour une première phase qui s’est achevée en 2008. Une seconde période d’exploration, qui devait se terminer en 2010, a été prolongée de 24 mois, soit jusqu’au 23 septembre 2012. Nous sommes aujourd’hui dans la phase de développement qui devra être âprement négociée entre BP et les autorités algériennes. Car, il s’agit de gaz non conventionnels, régis par la nouvelle législation.

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Les prétendus retards

Les investissements actuels de BP se résument en fait à deux complexes gaziers, In Salah et In Amenas. Pour ce dernier, l’association mise sur pied le 29 juin 1998 avec Sonatrach et Statoil devait consentir des investissements pour le développement et la production de quantités de gaz naturel situé dans la région d’In Aménas ainsi qu’au traitement des dites quantités de gaz naturel, en vue de l’extraction des gaz de pétrole liquéfiés (GPL) et du condensat. Il s’agit surtout de maintenir une production à hauteur de 9 milliards de mètres cubes, qui représente actuellement presque 12 % de la production nationale.

Cet investissement concerne quatre gisements découverts avant la date de signature du contrat (Tiguentourine, Hassi Farida, Hassi Ouan Abécheu et Ouan Tardert). La Sonatrach devait y participer à hauteur de 8,21% de son financement alors que les deux autres associés, Statoil et BP apportaient un financement à hauteur de 45,90% chacun. Le contrat de réalisation de cette nouvelle installation a été confié, le 5 mai 2011, aux japonais de JGC.

Les installations, qui devaient renforcer les capacités du CPF, ne seront toutefois pas livrées dans les délais contractuels. Prévues pour septembre prochain, ces installations verront certainement un retard important en raison de l’attaque terroriste perpétrée contre ce site et qui a contraint les japonais de JGC à le quitter. Du coup, on s’aperçoit que même si elle tenait à faire démarrer ces installations, BP ne le pourra pas sans la normalisation des rapports avec le maître d’ouvrage japonais.

Selon les experts, les travaux ne seront pas achevés avant la fin du premier semestre 2014. Et cela influera énormément sur les niveaux de production de ce complexe.

Le second investissement où BP exerce son diktat est celui d’In Salah. A travers ce complexe, il est question du développement de quatre champs (In Salah, Gour Mahmoud, Hassi Moumene et Garet El-Befinat) en vue de maintenir le plateau de production de gaz à 9 milliards de mètres cubes par an, soit la même quantité que celle d’In Aménas. Les travaux de réalisation des installations d’In Salah ont été confiés, en date du 11 avril 2011, à Petrofac qui devra les livrer au bout de 50 mois, soit avril 2015.

Coût de l’opération : 1,185 milliard de dollars. BP la finance à hauteur de 33,5%, Statoil ne participe que sur 31,85% alors que la Sonatrach a pris la plus grosse part de participation avec 35%. Par conséquent, les déclarations des responsables de BP relatives à d’éventuels retards sur les opérations de développement de ces deux gisements ne sont pas justifiées. Car, dès le départ, on savait que les installations n’allaient pas être livrées avant mai 2014 pour In Aménas et avril 2015 pour In Salah. On en déduit aisément que les Anglais cherchent à affoler les responsables algériens et les presser d’accepter les conditions imposées par la compagnie britannique.

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BG sur la même ligne

Les pressions britanniques subies par Sonatrach ne se limitent pas uniquement à BP. La compagnie du gaz BG Groupe se comporte de la même façon . Cette compagnie est entrée en Algérie en 2006, suite à un accord conclu avec Gulf Keystone pour l’acquisition de 36,75% du permis Hassi Ba Hamou (HBH, sur les blocs 317b, 347b, 322b, 348 et 349b) dans la wilaya d’Adrar.

Par la suite, Gulf Keystone s’est retirée de cette association en cédant une partie de ses participations à BG et une autre à Sonatrach. Mais avant même de rentrer dans la phase de développement, BG a décidé de vendre ses participations sur ce permis. En date du 7 mars 2012, la compagnie britannique a informé Sonatrach que sur les six sociétés (CEPSA, ENI, E.On Ruhrgas, PTTEP, SHELL et Pertamina) qui ont étudié les données techniques du périmètre Hassi Ba Hamou, seule Pertamina était intéressée par ce projet.

BG avait alors sollicité l’accord de Sonatrach pour continuer les discussions sur cette cession de parts au profit de la compagnie indonésienne. Deux semaines plus tard, Sonatrach a notifié à l’opérateur britannique, la nécessité de se conformer aux dispositions de l’article 30.2 du contrat, qui stipule que BG ne pourra en aucun cas céder plus de 49% de ses intérêts dans le contrat, lors de ses négociations engagées avec Pertamina. La compagnie BG Groupe a fait subir les mêmes souffrances aux responsables de Sonatrach dans la gestion de l’association sur le projet de Guern El Guessa. Après une première phase de recherche arrivée à échéance le 02/05/2012, BG a décidé d’abandonner le permis et clôturer le contrat.

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L’arbitrage pour saigner Sonatrach

La semaine dernière, la compagnie italienne Edison a obtenu gain de cause dans la procédure d’arbitrage international lancée contre Sonatrach. La société italienne, acquise l’année dernière par les français d’EDF, a gagné le procès portant sur les prix pratiqués pour l’achat du gaz algérien. Selon tous les experts, Sonatrach aurait dû négocier une fourchette de prix et obtenir un juste équilibre avec les Italiens d’Edison. Mais, on a préféré aller à l’ arbitrage et payer plus alors qu’on aurait pu négocier tranquillement autour d’une table.

Une procédure d’arbitrage international similaire a été lancée, contre Sonatrach, par l’autre italien Enel. Notre compagnie pétrolière devra encore perdre le procès et jeter de l’argent qu’elle aurait pu économiser avec un peu de bon sens et des négociations avec le partenaire. L’héritage de Chakib Khelil est lourd certes, mais cela ne justifie en rien le silence de son successeur sur les contentieux avec les compagnies étrangères. Sonatrach a déjà perdu beaucoup d’argent au profit des étrangers. Outre Edison, il faut rappeler les quatre milliards consentis l’année dernière à l’américain Anadarko.

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Le complot qatari

Alors que plusieurs experts en politique énergétique ont tiré la sonnette d’alarme sur la politique menée par les Qataris, l’Algérie continue de s’enfoncer dans le gouffre de la dilapidation de son gaz dans les projets industriels montés conjointement avec les groupes du Qatar. Après avoir évité de justesse le projet de l’usine de vapocraquage prévue à Arzew avec Total et Qatar Petroleum et économisé les quantités de gaz qui devaient être consommées par ce complexe, nos responsables ont consenti aux Qataris le projet de Bellara pour la production de 5 millions de tonnes d’acier par an.

Combien de quantités de gaz devra-t-on consommer dans ce projet ? Nul ne le dira.
Les Qataris, qui n’ont jamais investi dans l’amont algérien pour la production d’hydrocarbures, ont réussi à convaincre nos responsables de monter avec les Norvégiens des usines de pétrochimie pour consommer encore davantage le gaz algérien. Avec l’entrée en service des nouvelles centrales de production d’énergie électrique, notamment avec le programme des 8400 MW et les retards cumulés sur l’exploitation des gisements du Sud- Ouest du pays, l’Algérie ne pourra pas satisfaire ses engagements en matière de fourniture de gaz. La date fatidique de ce déclin est prévue pour 2017.

Les Qataris seront alors seuls sur le marché du GNL et négocieront notre part de marché sur l’Europe. Ces mêmes Qataris ont longtemps courtisé le réseau de distribution de carburants en Algérie. Comme l’avait évoqué El Watan, leur société Woqod a tenté par tous les moyens de s’accaparer des infrastructures stratégiques dédiées jusqu’ici à Naftal. Chakib Khelil les a longtemps soutenus contre les Turcs qui ont tout fait pour s’accaparer des stations de carburant sur le tracé de l’autoroute Est-Ouest. Même après le départ de Chakib Khelil certains responsables algériens ont maintenu l’option Woqod. Cette dernière avait désigné en 2011 un auditeur pour évaluer les opportunités de partenariat avec Naftal.

Le rapport établi dans ce sens a donné des frissons aux Qataris. L’auditeur a en effet mis en garde contre un partenariat avec Naftal pour deux principales raisons. Il évoquait notamment les mauvais réflexes développés par le personnel de l’entreprise, mais surtout taxé son syndicat de « réseau mafieux », qui contrôle le transport du carburant à l’échelle nationale. C’est sans doute sur la base de ce rapport que Woqod a décidé de constituer avec Sonatrach, un nouveau réseau qui exclurait Naftal. En décembre dernier, trois événements majeurs ont marqué ce dossier. L’arrivée du Premier ministre qatari avec des propositions pour Woqod, la décision de Sonatrach de mettre en place son propre réseau de distribution de carburant et, enfin, la levée de bouclier du syndicat de Naftal contre cette décision des responsables de leur société-mère. Depuis lors, rien n’a été rendu public sur le partenariat avec Woqod.

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Une opinion de Mokhtar Benzaki

in Le Soir d’Algérie

9 mai 2013