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Ghoul el Aïd

samedi 2 septembre 2017, par Alger républicain

Nous appartenions à une culture faite d’humanisme et de solidarité. Dans l’éducation que nous recevions autrefois, on ne parlait pas de religion pour en faire comme aujourd’hui le sujet de conversations ressemblant à d’interminables prêches, mais les grands parlaient de piété. Cela était important. L’éducation civique de base était d’abord enseignée à la maison : le respect de la parole donnée, vivre avec l’argent que l’on a honnêtement gagné, rembourser ses dettes, manifester sa solidarité avec ceux qui manquent de l’essentiel, avoir de l’honneur et du respect, apprendre à ses enfants que l’enseignement et le savoir sont des piliers de l’existence.

Le jour de l’Aïd el kebir n’était pas centré sur le mouton ou axé sur la manière la plus correcte de le sacrifier. Cette fête permettait de parler de l’un des prophètes, le premier de tous, Sidna Brahim el Khelil et son histoire.
Les préceptes de l’islam et la tradition populaire fixent bien les règles qui régissent l’action de sacrifier un mouton. Ils prescrivent surtout la destination de la viande obtenue.
La viande acquise par ceux qui ont plus de possibilités financières devait aller aux déshérités, à ceux qui n’ont pas les moyens de l’acheter et de la consommer durant l’année.

Mais pour les innombrables affairistes étalant de façon tapageuse leur bigoterie, comme si l’Islam était une nouvelle religion, avoir des moyens aujourd’hui signifie détourner directement ou indirectement les revenus de l’argent du pétrole. Et on oublie vite que ce pétrole et ce gaz ont été extraits et transportés par ceux qui sacrifient leur vie sous les rayons solaires brûlants du Sahara, loin de leur femme et de leurs enfants.

Avoir beaucoup d’argent cela signifie aussi ne pas payer ses impôts, ne pas déclarer ses salariés qui seront réduits à la mendicité au moindre accident sur la route ou sur le chantier. Et quand ils ne pourront plus travailler parce qu’ils ne percevront pas de pension de retraite, ni d’indemnité d’accidentés, on les verra tendre la main devant les mosquées où quelques-uns de ses biznessmen portant qamis immaculé leur feront l’aumône pour "laver leurs os".

Nous avons vu des gens acquérir des petits troupeaux de moutons qu’ils « offrent aux pauvres ». (le prix d’un mouton pour cet Aïd a varié entre 35.000 et 70.000 DA) Ces biznessmen vont donc offrir à ceux qui n’ont pas eu accès aux combines, des moutons qu’ils ont achetés avec l’argent que ces pauvres hères n’ont pas eu car ils ne sont pas intégrés dans la machine infernale du système et des connaissances efficaces en haut lieu.

L’islam ostentatoire d’aujourd’hui est donc devenu celui que ces individus méprisant les obligations fiscales et sociales fixées par la loi ont pétri dans la pâte de la débrouillardise et du t’bèzniss et assaisonné à la sauce de la chipa …

Le jour de l’Aïd, quasiment personne ne parlera à ses enfants de ce geste et de la solidarité qu’il préconise. Nous verrons même des gens de très bas niveaux de salaires qui vont emprunter de l’argent pour acheter un mouton* ! C’est une attitude totalement opposée aux préceptes de l’islam. Et chez nous, l’ijtihad a été oublié, enterré …

A côté de cela, les mandataires font leur loi et la courgette a atteint 300 DA le kilo et les navets 230 DA/kg. Ils offriront l’année prochaine des moutons aux pauvres avec une petite poussière des bénéfices.
Tant pis pour les ouvriers qui sortent exténués de l’usine ou des chantiers de bâtiment après une éreintante journée de labeur, tant pis pour les autres, pour tous ceux qui ne peuvent pas.
C’est maintenant ça l’islam et l’Aïd à l’algérienne : une vaste bouffe.

02.09.17

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