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N’oubliez pas de demander pardon !
vendredi 9 mai 2014
En partant, n’oubliez pas de demander pardon à la communauté artistique et culturelle nationale. Pas pour vos choix, votre allégeance au pouvoir, vos dérives langagières, vos maladresses en matière de gouvernance, vos approximations en culture ; non, demandez pardon pour avoir dilapidé les ressources financières et muselé les compétences nationales, pour avoir vilipendé les actions et les conduites citoyennes, pour avoir été autiste à toutes les propositions constructives, pour avoir comprimé notre présent et compressé notre avenir. Demandez pardon pour avoir épuisé les Hommes et éreinté la culture.
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Vos supporteurs attitrés dans cette communauté de la culture, tous ceux qui ont vécu de vos prébendes, de vos largesses - complicités de conjoncture - ne seront pas orphelins tout le temps. Ils feront d’autres allégeances et persuaderont leurs nouveaux interlocuteurs, qu’ils étaient le front intérieur de la résistance. Ils jureront vous avoir combattu, désobéi, avoir refusé de profiter du système et trouveront au moins dans leur parcours de servilité, un fait héroïque qu’ils s’empresseront de vendre médiatiquement.
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Au moment où vous quittez vos fonctions, le bilan « globalement positif » est un luxe que vous ne pouvez vous permettre.
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Culture en uniforme ?
Une scène culturelle ne se régente pas. Elle ne se construit pas avec des insultes, des rodomontades, des oukases, de la dépense d’argent. Vous le saurez dorénavant : la culture est une belle liberté, un levier contre les inégalités, un ferment de citoyenneté ; la communauté artistique, une richesse et une chance pour notre Pays.
Aviez-vous la volonté de nuire ? Je ne le pense pas. C’est plutôt votre proximité avec ce marché informel de la politique, cette paresse intellectuelle, cette roublardise idéologique, cette vantardise permanente qui a fait ce grand gâchis.
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Testament glacé
Vous aurez tout le loisir de réfléchir vos actes, méditer votre bilan, vos compromissions, la brutalité de votre « règne » et celui de votre entourage, la solitude de la communauté culturelle livrée à la prédation financière, la vulnérabilité des institutions culturelles réduites à une paresse sans fin, la turpitude des arbitrages, le pillage de l’intérêt public, les mauvais investissements, les fausses promesses, le vrai désespoir, la désillusion permanente, l’exil intérieur et extérieur des potentiels humains. Vous ne laissez pas un désert culturel, mais une sécheresse des cœurs, une culture de l’inculture, une inconscience de la conscience, un malaise dans le capital humain.
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Un pays détergent
Le personnel politique issu du dernier vide-grenier du pouvoir veut un « Pays détergent ». Saturé de conservateurs, ce pouvoir sur-mandat(é), promoteur d’une hygiène qui élimine les espoirs, traque la citoyenneté, pulvérise la compétence, brutalise la Kabylie et le M’Zab, travestit l’histoire. Il tente d’effacer ces salissures sur deux pattes, dotées de la parole.
La répression de la commémoration du Printemps Berbère fut une parfaite réussite et d’une ponctualité rare, à l’heure où Alger accueillait le salon de l’horlogerie. La répression et le mépris sont les seules recettes hors hydrocarbure.
Nous devons restaurer nos mots, nos expressions, réhabiliter nos insurrections, revitaliser nos oppositions. Elles doivent être sans concessions, non pas des parenthèses inattendues, mais une ponctuation permanente et délibérée de nos désaccords.
Ce pouvoir et ses hommes ont la culture du maquis, pas celui où ils auraient dû formaliser leurs actes de bravoure, non, le maquis de l’État brouillon, où il réfugie leurs incompétences et le désamour du pays qu’ils déconstruisent. Ils seront contraints d’honorer tant de promesses, il y aura tant de « serviteurs » à rétribuer, tant de clientèles à conserver. Ils sont à leur tour condamnés à la servitude, à l’exil intérieur.
Dans cette reconquête du « peuple », ils se savent sans passé, ils n’espèrent aucun avenir, sinon acheter du temps, jour après jour, dollar après dollar, fracturation après extraction, mensonge après promesse, dépendance après allégeance, nomination après exclusion.
Ce pouvoir, vous l’avez servi. On me trouvera dur avec vous. Peut-être que quelques nuances auront pu être envisagées. Que quelques louanges auraient dû être tressées. Certains disent déjà qu’en « privé », vous êtes une Dame formidable.
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Je juge une politique publique, un projet culturel, pas un cercle amical, encore moins le contenu d’un carnet d’adresses.
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Élégance de l’innocence : dans les jours qui suivront, vous nous livrerez votre pensée, vos états d’âme et je parie que vous nous prouverez votre investissement, votre amour du pays, votre passion pour les artistes, votre acharnement à faire vivre la lumière dans notre pays.
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Inélégance de la lucidité : vous comprendrez que je ne suis pas un admirateur, mais je sais ce que je vous dois : d’être resté éveillé, combatif, rebelle, curieux, « chercheur », fraternel et solidaire avec les miens.
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Mansour Abrous
5 mai 2014