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Guerre de libération nationale : il y a 60 ans, les Accords d’Evian étaient signés le 18 mars 1962
samedi 2 avril 2022, par
Le 18 mars 1962 étaient signés les Accords d’Evian et le lendemain, à midi, le cessez-le - feu entrait en vigueur entre l’armée française et le FLN-ALN, mettant fin à une terrible guerre qui a duré près de 8 ans.
Après 132 ans d’occupation coloniale, ce fut une très grande victoire pour notre peuple. Mais ce n’était pas gagné pour autant. La ploutocratie accrochée de toutes ses griffes au maintien de l’Algérie française, escomptant le soutien d’une partie de l’armée française va se déchaîner pour faire capoter le cessez-le-feu et les Accords auxquels étaient parvenus les représentants du gouvernement français et ceux du GPRA à l’issue de longs mois de négociations plusieurs fois interrompues à cause des manoeuvres de dernière minute de la partie française qui tentait jusqu’au bout à diviser les Algériens et à arracher le maximum de privilèges à un colonisateur incapable de venir à bout de l’héroïque combativité du peuple algérien.
Durant les trois mois qui suivirent, l’organisation criminelle et fasciste OAS créée en 1961 par les ultra-colonialistes, assassinera des milliers de nos concitoyens. Un mort tous les 10 m sur les trottoirs des grandes villes, Alger et Oran en particulier. Faire sauter des magasins appartenant à des compatriotes, mais aussi aux quelques éléments européens désirant continuer à vivre dans leur pays natal dans un Etat algérien, organiser le chaos dans toutes les régions du pays où elle était présente, en brûlant tous les archives et en détruisant les édifices publics, etc. Et d’autres crimes abominables sans nom. Après ce pogrom contre notre peuple, le référendum de l’indépendance fut organisé le 1er juillet. Le résultat ne faisait aucun doute. Notre peuple entérinera l’indépendance à 99,9%. Le glas du colonialisme avait sonné.
Il faut avoir participer à la liesse les jours qui suivirent la proclamation de l’indépendance pour comprendre ce que furent pour notre peuple ces moments inoubliables, gravés de façon indélébile dans la mémoire des Algériens qui avaient vécu dans leur chaire l’oppression coloniale et enduré tant de souffrances et de misères pendant ces 132 ans d’occupation barbare. Des millions de nos compatriotes sont sortis dans les rues de partout, dans les villes comme dans les villages les plus reculés de la campagne, des jeunes hommes, des jeunes filles, des enfants, des vieux et des vielles qui tenaient à peine debout. Ça chantait et ça dansait sa jusqu’à épuisement. Un mélange époustouflant où toutes les coutumes ancestrales tolérèrent que des femmes dansassent jours et nuits au milieu des hommes. Une forêt de drapeaux recouvrait cette immense foule baignant dans un bonheur indicible. C’était une joie intense de tout un peuple sans haine ni violence. Il manifestait tout simplement de bonheur dans la liberté retrouvée.
Certains qui, parmi les jeunes, sont incités à dénigrer leur pays par méconnaissance ou à le quitter, devraient voir et revoir les scènes de toute cette foule immense pour méditer le pourquoi d’une joie d’une telle intensité et le bonheur de tout un peuple, rarement observés ailleurs.
132 ANS D’OCCUPATION COLONIALE
Pour comprendre, il faut que les jeunes en particulier et même les adultes, se rappellent ce que fut la colonisation pendant ces 132 ans. Tout d’abord la conquête, un véritable carnage qui a duré plusieurs décennies. Des millions de cadavres algériens jonchèrent le sol. L’armée colonialiste n’épargnait même pas les femmes, les enfants et les vieillards. Le plus représentatif de ces monstres, le général Saint-Arnaud, se vantait des massacres qu’il faisait parmi la population. Dans l’armée de Bugeaud, une véritable armée de tueurs, c’était l’instrument des violences de détail, il participe à une destruction systématique, économique, humaine et culturelle. Il brûle des manuscrits uniques sauvés de Grenade ou de Cordoue appartenant à l’Émir Abd-el-Kader. Il vide les silos à grains, incendie les récoltes, coupe les dattiers et arbres fruitiers, pille le bétail, détruit les habitations pour faire mourir de froid les populations ou enfume des êtres vivants réfugiés dans des grottes.
L’enfumage de populations dans les grottes était une pratique courante de répression. Ils étaient enfermés, femmes et enfants avec leur bétail et mouraient asphyxiés dans des souffrances atroces. Il dira tout simplement « je me sentais un peu boucher ». Pour toutes ces monstruosités, il recevra la légion d’honneur et obtiendra le grade de Maréchal de France. Et même plus encore, une ville, des avenues, porteront son nom en reconnaissance pour ses « faits d’armes ». D’autres criminels, Lamoricière, Changarnier, Bedeau, Cavaignac, leur liste est longue car il y en avait bien d’autres qui n’avaient rien à envier à leur modèle, eurent droit aux sinistres réjouissances, aux cérémonies de baptisation. Le boucher en chef, le général Bugeaud, gouverneur de l’Algérie, avait donné l’ordre de fêter le zèle sanglant des exécutants de ses ordres « civilisateurs » : tout soldat touchait un pécule en échange d’un crâne arabe sorti de sa gibecière. D’ailleurs, les stratèges de la colonisation avaient d’autres sources d’inspiration. Ils voulaient déporter les Algériens dans les Iles. Ils voulaient appliquer la solution finale américaine contre les Indiens.
La conquête militaire française qui a duré plus de 60 ans a été un véritable bain de sang. L’armée ne faisait pas de quartier. Elle liquidait systématiquement les populations. Bugeaud veillait au grain. Des morts et des morts, tel était le bilan des ces charognards contre notre peuple.
L’OCCUPATION DU PAYS
Le deuxième point très important ce fut l’occupation totale du pays. Les colonialistes vont commencer par expulser nos paysans de leurs terres et les cantonner dans les régions les plus arides du pays où il n’y avait rien à manger. Ils devaient se nourrir de racines. La spoliation des terres a été un acte d’une violence inouïe. Pour Bugeaud et ses sbires, pour occuper totalement le pays, il faut suivre l’exemple des USA en faisant venir une population étrangère. Plus d’un million de migrants venus d’Europe, Espagnols, Italiens, Mahonais, Alsaciens et Français, vont envahir le pays. La suite on la connaît. Ils vont faire venir des anthropologues pour définir la méthode la mieux adaptée pour formater les individus suivant leurs besoins. Première leçon, empêcher tout contact avec les autochtones, aucun lien de quelque nature ne doit s’instaurer entre Arabes et les nouveaux venus. Il faut mener une politique ségrégationniste directe contre les Algériens. On va sortir un vocabulaire des plus sordides, les traiter de tous les noms, fainéants, voleurs, sous-développés, incapables de se diriger, leur donnant des noms rabaissant tels que bicot, melon, raton, tronc de figuier, bougnoul et d’autres insanités immondes, etc. On assurait aux nouveaux venus, souvent plus pauvres que ceux sur les terres desquels ils s’installaient qu’« ils ne reconnaissent que la force pour les faire travailler » ou on leur recommandait de « faire suer le burnous ». En un mot, inculquer aux colons l’idée qu’ils sont de race supérieure. Au final, développer un racisme sans nom, mettant les Algériens plus bas que terre. Ainsi cette masse de gens venus d’ailleurs va devenir le fer de lance de la colonisation. Tout cela s’est fait dans un cadre sordide, de massacres, d’humiliations et d’exploitation éhontée de nos fellahs et ouvriers, surtout dans une misère endémique insupportable pour l’ensemble de notre peuple.
Mais pour les troupes d’occupation, la colonisation n’a pas été une promenade de santé. La résistance de notre peuple a été constante et difficile. Pendant toute la durée de l’occupation notre peuple a résisté. Des révoltes ont été noyées dans le sang par l’armée coloniale. La résistance conduite par l’Émir Abd-El-Kader et les révoltes qui avaient pris naissance en 1870-1871 dans l’est du pays et auxquelles le bachaga El Mokrani s’était rallié, en sont les symboles.
Evidemment de nombreux massacres de population sans défense jalonneront l’occupation du pays. Le 8 Mai 1945 plus de 45000 morts, un véritable pogrom exécuté par l’armée française.
LA LUTTE ARMÉE, 1ER NOVEMBRE 1954
Le déclenchement de la lutte armée du 1er novembre 1954 n’éclata pas comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Ce fut le fruit d’un long processus de combat politique intense et de réflexion auquel contribuèrent aussi bien les courants nationalistes que le courant communiste. Celui-ci fut le premier à lancer et à propager au début des années 1920 le mot d’ordre de l’indépendance. En application des directives de l’Internationale Communiste le PCF déploya un grand travail dans l’émigration pour aider à la création de l’Etoile Nord-Africaine avec pout tâche la popularisation de l’objectif de l’indépendance nationale.
Le travail du PCF a donc même contribué en France à la formation politique des nationalistes, à monter leur propre organisation.
Notre peuple n’en pouvait plus de subir depuis 1830, les répressions féroces, les massacres sans nom, les humiliations, les arrestations arbitraires, la torture et les viols. Il fallait en sortir. L’ignoble massacre du 8 mai 1945 fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase. Par l’étendue des crimes commis par le colonialisme durant les semaines qui suivirent, le 8 mai fut l’acte annonciateur de la fin de la résignation, l’appel à en finir à jamais avec l’ordre colonial barbare instauré par l’impérialisme français.
Que s’est-il vraiment passé ce 8 mai 1945 ?
Cet événement historique marquant s’est produit à Sétif, pendant une journée mémorable, la fin de la deuxième guerre mondiale, la victoire de l’armée rouge sur la barbarie nazie. Un défilé est autorisé par les responsables coloniaux de la ville, qui précisent cependant que seul des drapeaux français seront agités. Les défilés sont organisés dans cette ville et dans d’autres pour fêter la fin de la guerre. Les nationalistes voulant profiter de la forte audience de cette fête, appellent à des manifestations pour rappeler leurs revendications. Des heurts ont éclaté un peu partout dans la manifestation, provoqués par les ultras de l’Algérie Française. Un policier tire sur un manifestant qui agitait un drapeau national et le tue. C’était un scout musulman âgé de 26 ans, il s’appelait Bouzid Saâl. Des émeutes ont éclaté dans plusieurs villes. L’armée française intervient et commence sans aucune raison ni sommation à tirer dans le tas à la mitrailleuse. Des milliers de cadavres jonchent le sol. Le gouvernement de De Gaulle fait intervenir l’aviation militaire qui va bombarder les mechtas et leurs alentours. La marine de guerre tire de la côte sur la foule qui fuit les bombes. Dans les gorges de Kherrata les soldats jettent dans une joie bestiale des centaines d’Algériens vivants par dessus bord à 450 m plus bas. Et pour glorifier leurs exploits, ils gravent dans la pierre de la falaise leur geste abominable.
Le 8 mai et les journées qui suivirent furent un véritable carnage, n’épargnant ni femmes, ni vieillards et ni enfants, laissant sur le terrain plus de 45000 morts. Mais pourquoi ?
La France des « droits de l’homme », le pays dont les politiciens hypocrites se targue à tout bout de champ des « valeurs républicaines » n’a pas supporté de voir notre drapeau national flotter au-dessus des manifestants, fêtant pourtant la fin de La boucherie de la 2ème guerre mondiale
Il fallait écraser ce mouvement coûte que coûte. Certains de nos tirailleurs mobilisés dans l’armée française ayant participé au combat pour libérer la France font partie des victimes de ce massacre.
Pour notre peuple et pour les dirigeants des partis patriotiques la coupe est pleine. La décision sera prise 9 ans plus tard : engager la lutte armée contre l’occupant restait la seule solution pour libérer le pays.
(1ère partie)
L.S.
26 mars 2022