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La prise d’un camion d’armes par Henri Maillot
lundi 4 avril 2016, par
Extraits de : "Parcours d’un communiste algérien", William Sportisse, Entretiens avec Pierre-Jean Le Foll-Luciani, Editions El-Ijtihad, Alger, 2013, pages 198-199.
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P.J Le Foll Luciani : C’est lors de ton hébergement chez les Maillot qu’Henri Maillot s’est ouvert à toi de la possibilité de détourner des armes de l’armée française à destination des combattants algériens.
William Sportisse : Je connaissais bien la famille Maillot depuis l’époque où Henri et moi militions ensemble à l’UJDA à Alger, en 1947-1948. Je connaissais également sa sœur Yvette, ainsi que ses parents. Henri n’était pas chez sa mère parce qu’il était mobilisé dans l’armée française. Il savait que j’étais là et que j’étais lié à la direction du Parti, alors il est venu me voir clandestinement, une nuit, en entrant par une issue dérobée. Il est resté toute la nuit et nous avons discuté. Comme nous étions amis, je pense qu’il se sentait particulièrement en confiance avec moi. Il m’a expliqué qu’il ne pouvait plus continuer à être dans l’armée française : il était Algérien, et il ne fallait pas qu’il se trouve demain dans une situation impossible. Il voulait participer à la lutte de libération. Il m’a dit qu’il convoyait des armes jusqu’à Alger, et qu’il lui était possible de les détourner. Je lui ai dit que je transmettrais cette information à la direction, mais que je ne savais pas si je serais encore là pour lui rapporter sa réponse. J’ai informé Bachir Hadj Ali : « Maillot m’a transmis cette information, voyez avec lui ce qu’il faut faire ». Je suis parti à Constantine quelques temps après, et c’est là-bas que j’ai appris que le détournement d’armes avait eu lieu, début avril 1956. J’avais donc accompli la mission qu’Henri m’avait confiée !
Le fait qu’il y ait des communistes européens comme Henri Maillot, Maurice Laban ou Georges Raffini qui ont pris les armes pendant la guerre de libération prouve que le PCA a joué un rôle. Parce que cette participation des Européens à été un facteur très important pour affirmer, contre ceux qui voulaient travestir la vérité, que notre guerre de libération n’avait pas un caractère racial. Les Algériens luttaient pour libérer leur pays du joug colonial, d’un système. Pas autre chose. Les colonialistes n’ont pas pardonné à ces Européens d’être du côté des Algériens, car pour eux, tout reposait sur la division entre les communautés. Les politiciens au pouvoir en France qui ont accepté que Fernand Iveton soit guillotiné, ont refusé de prendre en compte le fait que sa bombe n’avait pas explosé et qu’elle n’aurait fait aucune victime car l’usine était vide. François Mitterrand, alors ministre de la Justice, et René Coty, qui avaient pris la décision de l’exécution malgré la demande de grâce de l’avocat, voulaient donner un exemple à ces Européens qui avaient rejoint la lutte : « voilà le sort qu’on vous réserve. Vous êtes des traîtres ».