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Grève des travailleurs de la zone industrielle de Rouiba : "H’na machi maa l’khadra, H’na maa lkhodra !" (Nous, on n’est pas avec les Verts, mais avec les légumes)
mardi 12 janvier 2010, par
Un déploiement impressionnant des brigades anti émeutes et de la gendarmerie a complètement quadrillé la zone industrielle. Les trois cordons sécuritaires et le gros matériel anti émeutes ont réussi à scinder en trois groupes les manifestants, empêchant ainsi une marche programmée par le collectif des travailleurs.
Même si le déclenchement de la protestation a démarré des ateliers de la SNVI, le mot d’ordre de grève s’est propagé rapidement dans les autres entreprises telles Annabib, Magi, Moboscop, Tamag, Enag. Les 10 unités commerciales de la SNVI, à l’échelle nationale (Oran, Constantine, Tizi Ouzou…) sont également en grève. Le mouvement est rejoint par les entreprises CMA et ENMTP.
Le ras le bol est apparent chez l’ensemble des grévistes qui ont décidé de sortir dans la rue pour crier leur colère mais surtout leur mal vie : « On a décidé de ne compter que sur nous-mêmes, car notre représentant à la tête de la centrale syndicale nous a trahis. »affirment-ils. Les grévistes avec lesquels nous avons discuté tirent à boulet rouge sur Sidi Saïd, le SG de l’UGTA qu’ils accusent d’accointance avec le pouvoir pour mettre fin à de nombreux acquis. Ils estiment par ailleurs que les responsables de l’UGTA sont en décalage avec la base. Ils ignorent les conditions de travail des travailleurs et leurs véritables revendications.
Les travailleurs de la SNVI insistent sur le rôle stratégique joué par leur entreprise : « Nous intervenons pour le bien public à n’importe quel moment, nous avons fourni les chalets lors du séisme de Boumerdès et lors des inondations de Ghardaïa, le camion qui a permis à l’équipe nationale de football de parader à travers Alger, nous l’avons construit en 4 heures. Dès que l’on fait appel à nous nous répondons présents, au milieu de la nuit, dans le froid ou sous la pluie. Nous avons toujours travaillé pour le bien de notre pays ».
Ils sont indignés par le mépris affiché à leur égard et l’injustice qui les rend incapables de subvenir correctement aux besoins de leur famille. Sur un poteau électrique, les grévistes ont accroché un tableau qui expose le prix des denrées alimentaires : carotte à 70 DA, lentilles 160 DA. Le message est clair : arrêtez d’affamer les travailleurs. C’est pour cela qu’ils ont tenu à dire : "la qualification des verts (el khadra) au Mondial, c’est bien, mais la préservation de notre pouvoir d’achat pour acquérir des légumes frais devenus hors de portée, c’est mieux. Arrêtez de chercher à nous mener en bateau avec votre ballon".
M.Benmiloud, secrétaire général du syndicat SNVI, voit dans le mouvement des travailleurs le résultat logique face à une organisation qui n’écoute pas sa base : « Depuis plus d’un mois, les travailleurs n’ont cessé d’exprimer leur rejet des décisions de la tripartite, sans arriver à susciter un écho auprès des hautes instances de la centrale ».
Les travailleurs exigent une augmentation réelle des salaires et non pas les miettes distribuées par la tripartite, explique M. Benmiloud : « tant que l’article 87 bis existe, les augmentations ne toucheront jamais le travailleur. Avant, le SNMG représentait le salaire de base et non pas comme actuellement le salaire de base plus les différentes primes et indemnités. Pour cette tripartite on s’attendait à voir nos salaires grimper, on s’attendait à ce qu’ils annulent les ponctions de 0,5% pour l’allocation chômage et les 0,5% de cotisation pour le logement et qu’ils baissent l’IRG. »
Le poids de l’IRG sur la fiche de paye pénalise le simple travailleur, qui se retrouve à payer plus qu’un grand commerçant. Un ouvrier qualifié a estimé à 70 000 DA le montant de l’IRG qui lui est retenu à la source dans l’année.
M.Zototo, représentant syndical à la SNVI revient sur la seconde revendication, le maintien de la retraite après 32 ans de cotisations sans condition d’âge et le départ à 50 ans après 20 ans de cotisations : « Nous avons des métiers très pénibles qui ruinent la santé des travailleurs aux contacts de la forge, du polyester, des solvants, de l’emboutissage … et normalement ils ne doivent pas y rester toute leur carrière. Imaginez l’état d’un fondeur qui part à la retraite à 60 ans, c’est inconcevable. ». Les décisions de la tripartite ne répondent nullement aux aspirations et attentes des travailleurs dont le niveau de vie est de plus en plus grignoté.
Rien en ce mercredi, n’augure d’un retour aux ateliers, les travailleurs n’ont cessé de marteler leur décision de poursuivre la grève jusqu’à ce que leurs revendications soient prises en charge par les parties responsables. Avant de se disperser, les grévistes donnent rendez-vous dimanche aux services d’ordre. Ils maintiendront leur présence dans la rue.
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Safia Ouared
06.01.10